Les sorcières sautent et se cognent dans les murs

Samedi 12 Décembre 2009 :

Au petit déjeuner, on a fait du gâchis, on a jeté un sachet entier de pain de mie tout moisi. Avec la chaleur qu’il fait, on ne peut pas laisser grand chose hors du frigo…mais le frigo étant tout petit, on ne peut pas mettre le pain dedans.
Donc nous décidons de passer aux biscottes, ça au moins ça ne moisi point.
Bon, il n’y a pas de biscottes en Australie…en tout cas dans aucun des supermarchés où nous sommes allés. On se rabat sur des espèces de crackers…

On a réussi à télécharger des nouvelles musiques et on les a gravées sur un CD, on va enfin pouvoir écouter autre chose que du Renaud ou du Rihanna en boucle toute la journée. En plus, chaque matin, j’ai une chanson de Renaud qui me trotte dans la tête, toujours la même en plus….Dans mon HLM…Dans mon HLM…
On est resté sur un registre ringard, mais ça nous plait, c’est l’essentiel. Donc on a du faux Brel (chanté par Florent Pagny), du Joe Dassin, enfin de la chanson française.

Nous quittons Katherine, on a de la route à faire maintenant, il n’y aura pas de visites pour aujourd’hui.
La route que nous prenons est celle que nous avons prise en arrivant d’Alice Springs, mais cette fois nous la prenons dans l’autre sens vers le Sud. Vers 15h, nous arrivons à un croisement, on prend la route qui part vers l’Est. C’est une route à une seule voie, lorsque nous croisons quelqu’un, chacun se met à cheval sur la route et le bas côté. Pour les camions, nous nous mettons tout entier sur le bas côté, les camions ont la priorité et ne doivent pas aller sur le bas côté.
En fait quand je parle de gens que nous croisons, sur 260km, on n’en a croisé que 4 ou 5.
Par contre, les kangourous, ça y va, ils traversent partout sous notre nez.
Des vaches décharnées marchent tranquillement sur la route, c’est à nous de patienter le temps que ces dames daignent se bouger de là.
Leurs veaux n’ont rien compris, ils courent devant nous sur la route au lieu de s’écarter.
Des oiseaux aussi qui passent juste devant le pare-brise, jusqu’au moment où PAF !! On s’est pris un oiseau dans le capot, il fait une roulade par-dessus le van et retombe derrière nous, il y a des plumes qui volent partout, comme ce qui arrive quand on fait une bataille d’oreillers…
Bon, je ne compte pas tous les insectes écrabouillés sur le pare-brise…que je viens juste de gratter et de laver…

La nuit tombe tout doucement, on arrive enfin à un camping.

On s’installe sur un emplacement pas trop loin des WC et pas sous un arbre.
Je me prépare à aller prendre une douche. Je me mets un paréo autour de la taille de façon à ce qu’il recouvre mes jambes pour que les moustiques n’en profitent pas pour me piquer et j’y vais.
J’ai une cinquantaine de pas à faire pour arriver aux WC. Je marche la torche à la main, tout d’un coup il y a un truc qui me saute dessus. Qu’est-ce que c’est que ce truc ? Oh ! Bon sang, il y a un autre truc qui me saute dessus et qui s’engouffre sous mon paréo. AAAAaaaaaah !!!!! Maman !! Papa !! Mais qu’est-ce que c’est que ces machins ? Je galope vers les WC, il y a de la lumière là-bas. Devant les WC, il y a des sauterelles énormes partout, par-terre, sur les murs, sur le plafond. AAAAaaaaaah !!!!! Maman !! Papa !! Elles sautent !! Elles sautent sur moi ! Il y en a certaines presque aussi grandes que ma main, elle sont complètement stupides ces bestioles, c’est pas possible d’être débile à ce point, elles font des bonds et se cognent dans les murs et tombent par-terre, elles se cognent contre moi, c’est dégoutant, il y en a une pile-poil dans l’entrée des WC, je fais du bruit, je lui mets la torche dans les yeux mais elle ne bouge pas…la sorcière… et tout à coup, il y en a une autre qui sort des WC en bondissant et s’écrase débilement sur le mur-paravent des WC, elle tombe à terre…c’est complètement écœurant. On dirait qu’elles ont bu, elles titubent pour se remettre sur leurs pattes et recommencent à bondir dans un mur. J’entre dans les WC et là, c’est horrible, il y en a une trentaine d’énormes qui sautent partout, non, moi je ne peux pas me doucher dans ces conditions, je ressors en faisant des bonds chaque fois qu’il y en a une qui se cogne dans ma jambe. A mi-chemin entre les WC et la voiture, je suis assaillie, en plus je suis dans le noir, je ne les vois pas, je les sens se cogner sur mes bras, sur mes jambes, je suis au bord des larmes et je vais devenir hystérique. Je cris presque à Adrien d’allumer les phares de la voiture pour que je fasse les 25 derniers pas. Il les allume, je parcours ce qu’il reste, je suis à la limite de la crise de nerfs.

Du coup, je suis toute moite et je ne peux pas prendre de douche. Je prends le parti de me laver à l’éponge de bain (je n’ai pas de gant de toilette, ça n’existe pas ailleurs qu’en France, j’en ai cherché dans tous les pays d’Amérique du Sud, en Nouvelle-Zélande et en Australie, ça n’existe pas), donc je mouille l’éponge et j’essaie de me laver, mais en fait, à part me racler (elle n’est même pas douce cette éponge), je n’arrive pas vraiment à me laver. J’abandonne.

Il y a un truc qui fait du bruit depuis plus de deux heures près de la voiture, quelque chose comme un criquet, sauf qu’au lieu de le faire en continu, normal quoi, il le fait une fois toutes les demies heures, un genre de « Kssss ! » très fort. Adrien regarde autour du van où est la bestiole qui pousse des « Ksssss! », mais il n’y a rien en vue. Je lui dis qu’il doit être dans l’un des arbres autour de nous. On se prépare à aller nous coucher et ça recommence, là je lui dis que ça vient de l’intérieur du van, je l’ai très bien entendu, il doit être du côté de la cabine conducteur. Il cherche partout et il trouve l’affreux. C’est une sorte de cafard géant avec des ailes, il est entre le pare-brise et le tableau de bord. Adrien attrape un mouchoir en papier et l’écrase, il fait « Ksss! Ksss! Ksss! Ksss! » jusqu’à ce qu’il soit tout écrabouillé. Beurk !
Qu’est-ce qu’on fout là ? Il fait humide, il y a des sauterelles géantes folles, des cafards gigantesques à ailes ? Où sommes-nous ? On est dans « Chérie j’ai rétrécie les gosses », on est tout petit et les insectes sont géants, c’est une horreur.

On finit par se coucher, je suis toute moite, j’ai du mal à trouver le sommeil, je me réveille plusieurs fois dans la nuit et en plus j’entends les sauterelles qui sautent sur le van, qui glissent pour tomber lamentablement par terre.